Au nord de l’île de Boavista, se trouve une plage dont j’ai oublié le nom. S’y est échoué il y a longtemps un énorme navire qu’on a laissé là, puisqu’il n’y avait personne il ne gênait personne. Monumental et squelettique, il se penche doucement sur l’eau claire. Le sel et le vent l’ajourent de précieuses dentelles et comme les vieux illuminés il laisse passer la lumière. La rouille lui donne l’éclat de l’or rouge. Sa carcasse abrite tous les poissons et les oiseaux du coin.
Sur cette plage, les courants forts rejettent parfois des bateaux, souvent des déchets. Le sable est couvert d’objets en plastique parfaitement nettoyés par la mer, qu’elle dépose là et pas ailleurs, pour qu’ils soient tous rangés au même endroit. Cela donne à ce lieu un air chaotique et lumineux. On marche dans la clarté du ciel, de la mer et du sable, que le plastique opalescent reflète en mille éclats bleutés, vers la masse sombre de l’épave, comme vers un grand animal blessé.